Ou M&M's s'attendent de chaque cote de la montagne (The One with the broken rib)

Publié le par Marek

On se quitte donc ce matin la, sous un soleil radieux, qui a tout de meme un peu de mal a eponger le deluge de la veille. Le barometre me fait un grand sourire, je suis sur que Marjo va redescendre sans pb et devant moi il y a une superbe ballade. Que demander de plus !?

Je pars donc le coeur vaillant et la chaussure legere, malgre la gadouille ambiante. Des acrobaties de tronc en branche, de caillou en souche me permettent de garder les pieds au sec. 1h plus tard j'entre officiellement (le panneau me l'affirme) dans le Parque Tierra del Fuego. Ce sentier n'est pas trop couru donc pas de guichet a l'entree du parc ce qui m'economise les 20 pesos d'ingreso habituel. Yes! La terre de feu porte tres mal son nom. Le feu c'est chaud, c'est sec. La terre de feu c'est tout le contraire. En fait on y trouve tous les elements a part le feu. De la terre et des cailloux, certes. De l'eau, plus qu'il n'en faut pour rendre un million de crapauds heureux. Et du vent en quantites aussi, celui-ci etant livre sous forme de bourrasques plutot balezes qui me destabilisent et me valent qqes pas de cote de temps en temps (et une legere frayeur aussi lors de la premiere sortie au glacier ou une bourrasque a failli me pousser du mauvais cote au bord d'une falaise... et un rattrapage de cherie litteralement au vol lors de la descente de ce meme glacier !). Je patauge donc autant que je marche. Et .. je me paume dans les bois. La carte achetee a l'office des guides d'Ushuaia etant a l'echelle 1:100.000 au lieu des 1:25.000 habituels j'evalue mal mon deplacement, et les nombreux ruisseaux, cours d'eau et autres cascades nees de la pluie de la veille ne m'aident pas dans le reperage. La seule bonne surprise etant que les raidillons auxquels je m'attendais sont plutot de longues montees plutot tranquilles. Apres qqes errances ponctuees de traversees de rivieres sur des troncs d'arbres providentiellement couches en travers je finis par trouver plus ou moins par hasard le sentier. 3 heures plus tard re-paumage. Cette fois le sentier a bel et bien disparu dans le bush. Apres qqes minutes je repere une marque de l'autre cote d'un large torrent. J'avise un gros tronc d'arbre couche dans le bon sens et zou, encore une traversee. Avec le gros sac c'est un peu de l'equilibrisme .. et en dessous de moi le courant est plutot fort. Le tronc sur lequel je m'engage est glissant, je decide de changer de tactique et tente de m'asseoir sur un autre plus gros couche au dessus. En faisant un mouvement de contorsion destine a hisser le sac a dos sur le tronc mes cotes flottantes du cote gauche decident que c'en est trop et decident de se chevaucher. Ouch! Ca me fait l'impression d'un gros coup de poing dans le bide. Ca coupe la respiration et je reprends l'equilibre comme je peux entre mon sac a dos, le tronc glissant et la douleur. Heureusement ca passe vite et j'arrive a traverser le torrent dans une position plus acrobatique que celle que j'envisageais mais qui economise mon flanc douleureux. Une fois sur le chemin je pose le sac et tate les degats. Rien de special apparemment, mais toute contraction declanche une douleur fulgurante. Bon... De toute facon je suis plus pres de la fin que du debut et je me dis qu'apres une bonne nuit de repos il n'y paraitra plus rien. 2 heures plus tard j'atteints les bords de la Laguna del Caminante, seul endroit dans le parc ou le plantage de tente est autorise. Pour descendre au bord du lac par contre c'est la bataille (la derniere de la journee heureusment .. passque la je commence a fatiguer !). Le chemin boueux, en se rapprochant du lac se transforme en ruisseau et bientot j'ai le choix entre me casser la gueule dans la raide pente d'herbe humide qui borde le ruisseau ou descendre, les pieds dans l'eau, en passant par le fond du ruisseau, plus stable, quoique raide et glissant! Les cotes douleureusent ne me facilitent pas vraiment la progression et je ne peux compter que sur le bras droit pour me stabiliser. Arrive en bas je deplie la tente pour la faire secher (et en deloger les escargots !!) et je m'allonge dans le reste de soleil profitant du calme du lieu et de la vue sur les aiguilles, tours et autres glaciers du relief dechire qui m'entourent. Un fois que tout est sec je m'installe bien au chaud et apres une bonne sousouppe, un peu de lecture et de flute (la au moins je suis sur de ne casser les pieds a personne!) je m'endors en me massant les cotes. La nuit le vent se leve et la tente fait des grandes embardees mais resiste fierement. Entre ces rafales et la douleur je ne dors pas vraiment.

A 5h59 je desactive le reveil prevu pour 6h ... et j'ecoute tomber la pluie! Cette fois le barometre fait la gueule. La pression est tombee de 14hPa depuis la veille .... J'avais prevenu Marjo qu'en cas de coup de grisou la haut j'aurais de quoi tenir une journee en attendant une eclaircie mais en fait j'ai pas trop envie de poireauter ici, tout seul, avec pour seul compagnons la flute et un bouquin (naze, en plus). A 7h il flotte encore mais a l'occasion d'une sortie pour raisons physiologiques je constate qu'au dessus de la couche de crasse on entrevoit le ciel bleu. Et avec ce vent il y a des chances que ca se nettoie assez rapidement. Apres le p'tit dej, comme espere, cesse la derniere bruine et le soleil pointe le bout de son nez. Les bourrasques de vent transforment le pliage de tente en tango ou j'ai l'impression de danser avec un fantome vetu en orange et qui a la place des boulets traine des piquets et des sardines. Et c'est parti pour la descente vers Ushuaia. Mais pour descendre il faut d'abord sortir du fond du trou ou se trouve la lagune, puis franchir le Paso de la Oveja, a 1000m, pour enfin redescendre par le Cañadon de la Oveja vers le camping ou m'attend Cheraie bien au chaud et au sec avec son the et son miel aux noix! Les cotes toujours douleureuses du cote gauche je ne prends que le baton de marche dans la main droite pour eviter de tirer sur la blessure. La remontee dans le ruisseau est un pur bonheur. Les godasses deja trempees s'imbibent jusqu'a la derniere fibre. Heureusement le soleil commence a rechauffer un peu l'ambiance. La montee au Paso se fait dans un pierrier tres cordillierois, terrain connu donc! Arrive au col le spectacle est ebouriffant (sens propre + figure). Toute vegetation est restee bien loin derriere moi, je me trouve dans un desert de pierres. En dessous de moi une mer de nuages lourds, a mon altitude des trainees nuageuses pousses par le vent viennent se disloquer sur les pics qui entourent le col et encore au dessus, une 3 eme couche de nuages immobile semble accrochee au ciel comme un decor de fond. Je traverse le col, vaste et desert, et bientot j'appercois la vallee verdoyante au fond du Cañadon de la Oveja. La descente se fait par un pierrier. Je tente de proteger mes cotes mais ca rate pas, qqes rattrappages acrobatiques plus tard je me re-dechire tres douleureusement le flanc. Du coup je me concentre plus sur les pieds que sur l'itineraire et arrive dans les bois .. je me re-paume ! Descendre une vallee avec un ruisseau au fond c'est pas sorcier pourtant sauf que la, la vegetation est luxuriante et j'alterne les passages a sec avec les traversees de torrent (sans enlever les godasses cette fois .. vu l'etat dans lequel elles sont !!). Je progresse tres lentement.. Et j'ai de plus en plus mal. La sensation de cote cassee avec un morceau qui bouge me fait craindre le pire. Mon imagination s'emballe .. Je fais tout pour ne pas trebucher, craignant une perforation thoracique !! Ca serait trop con ! Au bout d'un moment j'en ai marre des acrobaties et decide de sortir du lit de la riviere en tracant vers la montagne ou la progression au moins sera plus rectiligne et moins glissante! Et la blam je tombe sur un gros sentier qui semble suivre le cours d'eau. Je ne le lache pas et 3h plus tard j'arrive en vue d'Ushuaia! Maintenant 1) prevenir cheraille 2) aller passer un examen aux urgences ! Encore une bonne heure plus tard j'atteins la civilisation et la piste tres frequentee qui mene a la ville. Un gentil automobliste me prend en stop et me depose au camping. On file ensuite en taxi aux urgences ou j'apprends qu'on ne peut pas se casser des cotes en bougeant mais uniquement avec un choc externe. Ouf ! J'insiste pourtant sur la douleur et la sensation de morceau casse. Le gars me rassure 3 fois et me prescrit des anti-inflammatoires et du repos ! Re-ouf ! Donc les 6 jours qui restent on va se poser dans notre sympathique camping et y aller mollo .. en attendant la suite de nos aventures de l'extreme dans le Parque Torres del Paine !!! (avec un peu moins de gadoue, inch'allah!) ... A bientot .. apres la sequence convalescence !!

Publié dans Patagonie

Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :
Commenter cet article